La légende dorée
Dans le miroir historique de Vincent de Beauvais,
une grande place est tenue par les saints. Ceux-ci sont à
la fois des intercesseurs et des patrons, d'où leur grande
popularité. Leur culte est rendu vivace par les corporations
de métier. La vie des saints est racontée dans
le livre de lecture du choeur, le Lectionnaire. La légende
dorée de Voragine est une sorte de compilation de ces
textes. |
|
Les saints sont représentés
dans les vitraux (où toute leur vie est racontée)
ou sous forme de statues dans les ébrasements. Dans
ce dernier cas, on est parfois confronté à un
problème d'identification. Pour pallier cet inconvénient,
à Chartres, on a représenté une scène
de la vie de chaque saint dans un médaillon au pied
des statues. Une autre solution consiste à les représenter
tenant les instruments de leur supplice à la main.
Mais les emblèmes choisis peuvent variés dans
le temps.
Si l'art se nourrit de la légende dorée
et de l'imagination populaire, il l'alimente en retour. Ainsi
les artistes ont-ils pris l'habitude de représenter
saint Denis tenant entre ses mains sa tête décapitée.
La scène a reçu l'interprétation suivante
: le saint aurait, après son supplice, ramassé
sa tête. Cette lecture populaire de l'uvre d'art
passe dans la Légende dorée. Plusieurs légendes
naissent ou sont complétées par l'interprétation
erronée d'une uvre d'art.
Saint Denis, ébrasements du portail
nord de la façade occidentale de Notre-Dame de Paris
|
|
Les saints les plus représentés
sont les apôtres. Tous ne connaissent cependant pas un
succès égal. En premier lieu, on distingue Paul
et Pierre, souvent associés. Les plus connus sont
ensuite Jean, Thomas et Jacques. Seul trois apôtres ont
des physionomies reconnaissables : Saint Pierre, en raison de
ses cheveux courts et crépus, Saint Paul, grâce
à son crâne dégarni, et Saint Jean, toujours
imberbe. |
|
Pour faciliter la distinction, ils sont progressivement
dotés d'attributs : à Paul, l'épée,
à André, la croix qui porte son nom, à
Jacques le Mineur, une massue, à Barthélemy
un couteau, à Jean un calice avec un serpent, à
Saint Jacques, l'épée et le bourdon, à
Saint Thomas une équerre. Les autres, le plus souvent,
n'ont pas d'attributs fixes.
Ebrasements du portail central
de Notre-Dame de Paris
Saint André, Musée
du Petit Palais, Avignon
|
|
|
Episode de Simon le magicien
Pierre
et Paul comparaissent devant Néron, qui s'est entiché
d'un magicien, Simon. Ils confrontent leurs pouvoirs et Simon
est vaincu. Voyant que ses talents ne sont plus appréciés,
Simon veut quitter Rome. Il s'élance du Capitole et
se met à voler. Les apôtres, contraints de démontrer
leur supériorité, provoquent sa chute par leurs
prières. Néron, inconsolable, emprisonne les
apôtres.
|
Chapiteau de Saint Lazare d'Autun. On voit
Pierre avec sa clef et Paul qui, par leur prière provoque
la chute de Simon, lâché par le diable qui le
soutenait.
|
Après les apôtres, on note une
préférence pour les saints locaux. Saint Marcel
est à l'un des trumeaux de Notre-Dame de Paris, plusieurs
tympans de Bourges sont consacrés à des saints
de la région.
Portail Saint Ursin de Saint
Etienne de Bourges
|
|
Enfin, certains saints bénéficient
d'une notoriété particulière. C'est le
cas de Saint Etienne, Saint Martin, Saint Vincent, Saint Laurent,
Saint Sébastien, Saint Gervais et Saint Protais, Saint
Eustache, Saint Denis... |
Explication du retable de Saint Eustache,
Saint Denis
Placidus, général romain, se
convertit au christianisme après une vision : il voit
une crois apparaître entre les cornes d'un cerf qui
le convainc de se tourner vers le Christ. Après avoir
également converti sa famille, Eustache part avec elle
en Egypte. Pour payer la traversée, il doit laisser
sa femme au batelier. Il part donc seul avec ses deux enfants.
Pour traverser un fleuve tumultueux, il doit laisser un de
ses deux fils sur un bord. Lorsqu'il revient le chercher,
alors qu'il est au milieu du fleuve, un loup s'empare de celui
qui a déjà traversé et un lion emporte
de celui qui est resté sur l'autre bord. De longues
années s'écoulent puis toute la famille se retrouve
par d'heureux hasards. Mais le gouverneur de la région
persécute les chrétiens. Saint Eustache et sa
famille sont arrêtés et suppliciés dans
un taureau d'airain placé sur un brasier.
|
La représentation des saints est souvent
liée à la présence dans l'église
de reliques de ce saint. Des images sont choisies par les pèlerins
reconnaissants à leur retour (images de Saint Jacques,
Saint Nicolas (pèlerinage de Bari), Saint Martin (pèlerinage
de Tours)). Des vitraux peuvent également être
donnés. Ainsi Ferdinand de Castille offre-t-il à
Chartres un vitrail consacré à Saint Jacques.
Les corporations offrent des vitraux représentant leur
protecteur. Cela explique certains programmes iconographiques.
Cependant, le plus souvent, les chapitres suggèrent aux
donateurs les thèmes des vitraux qu'ils souhaitent offrir.
|
|