Introduction
|
Le péché est omniprésent au Moyen Age.
Il rythme le temps biblique (alternance péché/rédemption)
et l'espace terrestere (entre la terre envahie par le péché
et le monastère qui est censé en être
pur) et céleste (paradis/enfer). Le péché
est au sein de nombreuses pratiques rituelles (confession,
baptême, pélerinage...) mais aussi dans toute
la vie sociale (les relations homme/femme sont empreintes
de luxure, le commerce d'avarice, le travail est considéré,
pendant longtemps, comme la punition du péché
originel...) et au coeur de l'individu (tension perpétuelle
entre le corps et l'âme). L'importance du péché
est liée à celle de la pénitence, enjeu
primordial pour l'Eglise (une obligation confession annuelle
est instaurée en 1215).
Le tentateur, grouillant de serpents et de
crapauds, Notre-Dame
de Strasbourg
|
La définition du péché
Le péché
originel, fondamental, fait l'objet d'un traitement particulier.
On s'intéresse ici aux réflexions théologiques
touchant les autres péchés. La pensée
monastique associe longtemps vice et péché :
l'homme corrompu par le péché originel à
une tendance innée au mal. La lutte contre le péché
est associée à la lutte contre la chair (contemption
du monde, ascétisme). Abélard vient contredire
cette conception monastique du péché. Pour lui,
ce dernier se distingue du vice. Il réside dans l'intention,
dans l'assentissement de la volonté (et pas seulement
dans la violation effective d'une norme). Le péché
n'est donc pas une fatalité : il résulte d'une
conscience libre. Après Abélard, cette notion
d'intentionalité perdure, avec des nuances, dans la
définition du péché. De nombreux théologiens
reprennent pour base une phrase de saint Augustin selon laquelle
le péché est une parole, une action ou un désir
contraire à une loi divine.
|
|
Il existe de nombreuses classifications
des péchés, souvent complexes, utiles tant pour
leur connaissance que pour la gestion pratique des activités
pastorales (confessions, pénitences....). Celle qui rencontre
le plus grand succès littéraire et théologique
est la classification en péchés capitaux, créée
au Ve siècle par Cassien et reprise ensuite par Grégoire-le-Grand.
Il existe huit péchés capitaux : l'orgueil, le
plus important, dirige les sept autres (vanité, envie,
colère, paresse, avarice, gourmandise, luxure). D'autres
classifications existent, comme celle des trois tentations (prééminence
de la luxure, de l'avarice et de l'orgueil) ou du décalogue
(en fonction des dix commandements), sans compter les distinctions
entre péchés mortels et péchés véniels...
Les sept péchés capitaux,
Jérôme Bosch, musée du Prado |
La place des péchés évolue avec le temps.
Au XIIIe siècle, l'avarice tend à prendre le
pas sur l'orgueil du fait de l'émergence de la classe
marchande (croissance des échanges commerciaux) et
de la pratique plus répandue de l'usure. La valorisation
grandissante du travail tend à aggraver le péché
de paresse (l'oisiveté est mère de tous les
vices). La luxure, quant à elle, fait toujours recette.
On constate également, au XIIIe siècle, l'apparition
du péché de la langue (ou de la parole) qui
réunit les blasphèmes, mensonges, insultes et
autres péchés proférés par la
bouche.
Pécheur se faisant arracher
la langue, tympan de Conques
|
|
|
|