L'origine du mot cathédrale
La cathédrale a d'abord été désignée sous le nom d'ecclesia mater ou major. Il ne s'agit donc que d'une église qui se distingue des autres parce qu'elle est le siège de l'évêché. Le mot cathédrale, qui prend son sens définitif au VIIe siècle, rappelle plus fortement cet attachement à l'évêque puisque la cathèdre désigne le siège de l'évêque. Dans d'autres pays, le même ensemble est désigné par le mot duomo (Italie) ou Dom (Allemagne) qui vient du latin domus (maison) : il s'agit de la maison de Dieu.
Evolution du plan des cathédrales
Dès
le quatrième siècle, l'Eglise installe dans
chaque ville un évêque. Cela implique donc la
construction d'une cathédrale. Celle-ci s'implante
à l'intérieur des murs de la cité, avec
les autres bâtiments administratifs. Elle prend souvent
la place de monuments antiques (temples, palais...) qui sont
rasés pour permettre son édification. L'ensemble
appelé cathédrale comprend un ou plus souvent
deux édifices de culte, un baptistère,
une maison et éventuellement un lieu d'accueil pour
les déshérités et les voyageurs. La cathédrale
elle-même est assez large (quatre ou cinq nefs),
plutôt claire (nombreuses baies), décorée
de marbre et de mosaïques. Elle s'inspire de la basilique
civile romaine. L'extérieur est d'une architecture
rigoureuse.
La
première évolution se fait à l'époque carolingienne.
La désorganisation du clergé séculier
suscite une réforme : on oblige les clercs à vivre en communauté
près de la cathédrale.
La cathédrale prend des allures de monastère (réfectoire, dortoir, cloître). Ainsi se forment les collèges de chanoines, qui partagent les revenus du diocèse avec l'évêque. L'extension de la cathédrale, qui comporte alors deux chevets symétriques, oblige parfois à réorganiser la cité. Souvent, l'un des deux édifices de culte existant à l'époque précédente disparaît tandis que l'autre est réaménagé (ce sacrifice d'un des deux bâtiments devient systématique par la suite). Le cloître (ci-contre à Elne) apparaît également pendant cette période. S'il se répand plus vite dans les monastères, on en trouve aussi dans les enclos canoniaux des cathédrales.
A l'époque romane, de nouveaux édifices sont construits, les plus anciens sont aménagés pour réunir chanoines et fidèles. Les cathédrales prennent, comme les autres églises, l'aspect d'une croix latine, ce qui suppose la suppression d'un des chevets et la constitution d'un transept (3).On partage l'espace entre les religieux (chanoines et évêques) qui bénéficient de stalles individuelles et les laïcs : cette répartition, renforcée ensuite par l'édification d'un jubé, persiste jusqu'au Concile de Trente. Plusieurs problèmes se posent. Les évêques voulant rivaliser avec les abbayes en matière de reliques, plusieurs cathédrales prennent la fonction d'églises de pèlerinage. Elles doivent donc s'adapter à l'afflux de fidèles tout en préservant le culte habituel.De manière générale, les églises doivent faire face à l'augmentation du nombre de fidèles. Pour cette raison, la nef est progressivement libérée des autels qui l'occupaient : ceux-ci sont repoussés dans des chapelles rayonnantes (2) autour du déambulatoire, couloir imaginé à l'origine pour circuler autour des reliques. On voit aussi l'apparition de façades harmoniques pour faciliter l'accès des fidèles à la cathédrale (l'accès étant antérieurement rendu plus difficile par l'existence d'avant-corps).
A l'époque gothique est entreprise une campagne de
reconstruction répondant à l'évolution démographique
et aux exigences du culte. Cette campagne est également profondément
ancrée dans l'espace urbain : le gigantisme d'une cathédrale
(particulièrement frappant au Nord de l'Europe continentale) fait
partie intégrante d'une symbolique de domination de la ville.
Les
édifices sont agrandis, les accès à la cathédrale
différenciés, l'accueil du fidèle amélioré.
Les façades harmoniques
se généralisent ( notamment dans le Nord de la France et en
Espagne ; le Saint Empire romain germanique est plus hésitant ; le
rejet anglais est catégorique) et s'ornent de programmes iconographiques
pédagogiques. Souvent l'espace du transept
est conquis par les fidèles : la clôture
se situe désormais au niveau des piles orientales. A partir du Concile
de Trente, les clôtures deviennent grillagées pour que le
fidèle soit moins coupé de l'autel.
Le succès des chapelles rayonnantes est important (surtout en France et en Espagne, moins en Italie et en Allemagne). Les cathédrales qui n'en disposaient pas initialement s'en dotent par des moyens divers : on dispose les chapelles entre les contreforts (Notre-Dame de Paris), on leur donne des formes originales (chapelles carrées de Laon). Certains édifices, conçus avec une nef unique, aménagent un déambulatoire avec chapelles dans le volume originel en utilisant la clotûre (Albi, Saint Bertrand de Comminges).
Des
modifications apparaissent également au niveau du transept.
Certains architectes tentent de supprimer les croisillons,
la cathédrale perdant alors sa forme de croix (Bourges,
Senlis...). Mais l'apport décoratif des bras du transept convainc
finalement les bâtisseurs de ne pas persister dans cette voie et même
de corriger ce qui a été fait antérieurement (Senlis,
Sens).
Quant
aux cloîtres,
ils se sont beaucoup développés dans les monastères
dès la période romane (Moissac)
et prennent leur essor dans les enclos canoniaux dès
le tout début de la période gothique, particulièrement
dans le Midi (le Nord se refusant à la vie commune, qui
seule justifie l'existence d'un cloître).
Ce développement des cathédrales n'allait pas sans poser de problèmes : celui du terrain manquant (expropriations nécessaires...), celui du financement. Les changements de projets ne facilitent pas la tâche, même si les tergiversations font parfois naître des oeuvres uniques et magnifiques (ex : Strasbourg). L'achèvement de certaines cathédrales est long (jusqu'au XIXe parfois), voire impossible. Les façades sont parfois tardives (Barcelone), de même que l'élargissement des parvis.