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L'art gothique de Bohême
est imprégné du cosmopolitisme artistique Européen,
mais des influences régionales lui apportent une note originale.
A partir du XIVe siècle, les artistes tchèques recherchent
une plus grande unité de l'espace et adoptent comme modèle
privilégié l'église-hall. Les églises à
deux vaisseaux au lieu de trois se multiplient. On tente de supprimer
les piliers des arcades qui rompent l'unité des espaces (on observe
le même type de recherche dans le sud de la France, à Albi,
par exemple).
La cathédrale
Saint Guy se situe en dehors de ce courant, l'influence étrangère
est plus prononcée. Saint Guy constitue l'avant-dernière
cathédrale de type français (la dernière étant
le Duomo de Milan). C'est Jean de Luxembourg, dit l'Aveugle (mort à
la bataille de Crécy), roi de Bohême, qui réussit
à faire passer Prague du rang d'évêché à
celui d'archevêché en 1344. La construction de la cathédrale
est décidée la même année.
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Cependant, c'est son fils Charles IV, roi de Bohême
en 1346 et empereur du St Empire Romain Germanique en 1355 qui va jouer
un rôle déterminant. Elevé en France, le nouveau souverain
veut faire de Prague le centre de l'Empire. Pour cela, il dote la ville
d'une université, il décide de reconstruire le château
de Prague et de bâtir en son sein une cathédrale digne des
cathédrales françaises. Charles IV choisit assez logiquement
un architecte français, Mathieu d'Arras, qui a surtout travaillé
dans le sud de la France : il apporte donc un type méridionalisé
des cathédrales françaises. Le plan initial prévoit
deux collatéraux et un décor limité au minimum. Le
français meurt en 1352, alors que seul les bases du chevet sont
posées. |
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Après quelques années
de tergiversations, de Charles IV choisit pour le remplacer un artiste germanique,
Peter Parler, qui n'a alors que 23 ans (1356). Le projet initial est remis
en cause, d'un commun accord entre l'artiste et l'empereur. Parler ajoute
de la lumière (triforium ajouré), des éléments
de gothique tardif (mouchettes, voûtes en lacis). Il meurt en 1399 (soit
21 ans après Charles IV) et son fils lui succède jusqu'en 1406.
L'architecte suivant, peu connu, édifie la tour sud.
En 1419 survient la révolte
hussite, qui provoque un appauvrissement du trésor de la cathédrale
et l'interruption des travaux, alors que Saint Guy n'a pas encore de nef.
A la fin du XVe siècle, on construit un oratoire royal et un couloir
de style gothique tardif pour relier le Palais à la cathédrale.
En 1541, un incendie détruit une partie de l'église. La restauration
dure 20 ans. C'est à cette époque qu'on ajoute un bulbe de cuivre
sur la tour sud. En 1619, l'édifice est dévasté par les
protestants. Les travaux de la nef, à peine envisagés, sont
abandonnés immédiatement (épidémie de peste, révolte
des serfs).
Saint Guy devra attendre le
XIXe siècle pour être enfin achevée (par Josef O Kramer
puis Josef Mocker). Le décor intérieur est refait. La nef est
coiffée en 1903 d'une voûte à lacis conforme aux plans
de Parler.
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Extérieur
Il s'agit d'une façade harmonique classique. Les deux tours,
parfaitement symétriques, sont à trois niveaux : le portail,
surmonté d'un gâble, une baie en arc brisé, une
série de cinq petites arcatures aveugles précédant
le clocher, le tout étant coiffé d'une flèche.
Au centre, le portail est également surmonté d'un gâble.
On trouve au second niveau une rose inscrite dans un arc brisé.
Un pignon précédé d'une courtine surplombe l'ensemble.
Toute la façade est ornée de multiples arcatures aveugles,
de niches abritant des statues, d'arc à crochets.
Le tympan du portail central date du XXe siècle. Il s'agit de
la crucifixion du Christ. Les deux larrons y figurent ainsi que la Vierge
pâmée et soutenue par St Jean. Le registre inférieur,
divisé en deux parties : à gauche des soldats jouent aux
dés le manteau du Christ, à droite, on assiste à
la mise au tombeau.
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Une grande importance est accordée à la façade
sud et ce pour deux raisons : d'une part, cette façade est celle
qui fait face au palais ; d'autre part, elle ouvre sur la chapelle Saint
Venceslas, le saint protecteur de Charles IV. La porte du transept sud
est donc conçue comme l'entrée principale. Le portail
est constitué par un portique à trois entrées,
surmontées d'une grande baie vitrée aux remplages flamboyants,
appelés mouchettes. Ce portique est flanqué sur sa gauche
par une magnifique tour à cinq niveaux. Au premier niveau se
trouve une baie vitrée, au second, une baie ornée d'un
splendide grillage doré, au troisième, une première
horloge, au quatrième, une seconde horloge incluse dans le remplage
d'une baie à arcades géminées. Le dernier étage,
en pierre blanche, est percé sur toutes ses faces de trois ouvertures,
il est surmonté du clocher.
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Tant au niveau de la nef qu'à celui du chevet, on
trouve des arcs boutants à deux niveaux et à double volée
avec des culots très rapprochés. Les pinacles sont reliés
par une balustrade partiellement aveugle (ornée d'arcatures) qui
entoure la toiture. |
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Au revers de la façade on trouve
une sorte de tribune ornée d'arcatures aveugles et percée
d'un large arc en tiers point qui ouvre sur la nef. Au dessus de cette
tribune on trouve une petite balustrade puis une grande rose.
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La nef comporte
cinq travées voûtées en réseau. Son élévation
est à trois niveaux. Au dessus des grandes arcades, le mur est
ponctué par des armoiries. |
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Le triforium, à claire-voie , est précédé
d'une balustrade. Chaque baie est composée de six arcades, les
quatres arcades du centre ont des arcs tréflés et reposent
sur des piliers robustes. Les deux arcades aux extrêmités
sont composées de deux arcs à clef pendante, et se présentent
un peu comme les volets d'un tryptique, légèrement refermés
sur les volets du centre. On trouve à ce niveau une galerie de
21 bustes qui représentent Charles IV et sa famille, trois archevêques
et autres dignitaires, et les bustes de Matthieu d'Arras et Peter Parler.
Les six lancettes des fenêtres hautes suivent la même disposition.
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Le transept,
peu marqué, comporte deux travées latérales.
Le choeur comprend le
même nombre de travées que la nef, auquel s'ajoute un rond-point
à cinq pans donnant sur cinq chapelles rayonnantes. L'élévation
des travées droites du choeur et ses voûtes sont semblables
à celles de la nef. Dans le rond point, on trouve un triforium
à claire voie composé de quatre arcades et des fenêtres
hautes à quatre lancettes. |
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